Projet EBO-SURSY

Sur le terrain aux côtés du projet EBO-SURSY : la surveillance de la maladie à virus Ebola au sein des populations de chauves-souris

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Dans le cadre de missions scientifiques soutenues par le projet EBO-SURSY, le biologiste Ndong Bass Innocent Wultof prélève des échantillons auprès des populations sauvages de chauves-souris au Cameroun dans le but de réaliser un suivi de la présence de la maladie à virus Ebola (MVE) ainsi que pour enrichir une base de données centralisée. Le renforcement des réseaux techniques et des capacités de surveillance et de diffusion de l’information, ainsi que la communication directe avec les communautés sont au cœur du projet EBO-SURSY.

Cameroon- EBO-SURSY 2018

En amont d’une mission de terrain classique de deux semaines visant à effectuer des prélèvements sur des roussettes, Ndong Bass Innocent Wultof, biologiste du Centre de recherche des maladies émergentes et réémergentes (CREMER) au Cameroun, prend contact avec les instances gouvernementales locales et les autorités administratives traditionnelles des aires géographiques ciblées. Dans le cadre du projet EBO-SURSY, et en partenariat avec l’Institut de recherche pour le développement (IRD), Ndong Bass Innocent emmène au moins une fois par mois une équipe de quatre personnes sur l’un des cinq sites de prélèvement situés au Cameroun.

Chacune de ces missions de recherche débute par des réunions de sensibilisation des communautés. Ces séances ont pour objet d’expliquer la présence de l’équipe et de mettre en lumière le risque que représente cette maladie pour les populations, alors que de nombreuses personnes la considèrent comme une « illusion » dans la mesure où le Cameroun n’a déclaré, pour l’heure, aucun cas de maladie à virus Ebola (MVE). Luttant contre ce préjugé, le représentant ou le chef de la communauté et ses notables recrutent ensemble une équipe de guides locaux qui seront aussi assistants sur le terrain.  En participant, ces guides locaux approfondissent leurs connaissances et améliorent leur aptitude à communiquer des renseignements exacts à leurs pairs tout en mettant un terme aux mythes qui entourent la procédure de recueil des échantillons.

Entouré de pays affectés par la MVE [voir carte], le Cameroun est considéré comme un pays « à risque » et s’attache à garantir que ses systèmes de suivi et de détection de la MVE soient les plus efficaces possibles. Tant que le réservoir naturel de la MVE n’a pas été caractérisé, la roussette africaine (une espèce de chauve-souris frugivore) est considérée comme le réservoir potentiel de la maladie. Elle peut la transporter sans être infectée et la transmettre à d’autres animaux et aux humains.

En apprendre davantage sur le réservoir de ce virus ainsi que sur le mode de transmission de la maladie permet aux scientifiques et aux professionnels du monde médical d'améliorer la riposte sanitaire au niveau des populations humaines, tout en protégeant la faune sauvage sensible.

Dans cette optique, l’équipe de Ndong Bass Innocent réalise des prélèvements sanguins, recueille du sang séché, effectue des prélèvements oraux et rectaux sur écouvillons, et collecte de la matière fécale séchée auprès d’au moins 250 chauves-souris au cours de chacune de ces deux semaines de mission au Cameroun, majoritairement après le crépuscule et avant l’aube, aux moments de la journée où les chauves-souris sont les plus actives. Munie d’équipement de protection individuel (EPI) pour leur propre sécurité, l’équipe de chercheurs installe un filet de canopée spécifique à la cime des arbres et/ou un piège harpe dans les zones forestières et les grottes où les chauves-souris vivent. Cette procédure permet de les capturer, de réaliser les prélèvements, et ensuite de les relâcher. Outre le recueil d’échantillons, l’équipe examine les chauve-souris à la recherche de parasites externes connus sous le nom d’ecto-parasites qui peuvent causer des maladies et pourraient également représenter une autre source de transmission d’une espèce à l’autre, ainsi que d’autres symptômes de maladie.

Manipulés avec précaution et en conformité avec les Normes internationales de l’OIE sur la sécurité et la protection biologique, ces échantillons sont alors traités par des laboratoires spécialisés. Les données telles que le lieu de prélèvement, la méthode de capture des sujets (piège harpe ou filet), la distance jusqu’au village le plus proche, le régime alimentaire, le sexe, l’âge, la taille, le poids de l’animal et son statut sanitaire sont également enregistrées. Les échantillons sont ensuite conservés au sein d’une base de données centralisée, constituant une ressource précieuse pour les chercheurs qui travaillent sur la compréhension de la transmission d’Ebola et l’identification de son réservoir ou vecteur. Une meilleure compréhension qui pourrait tôt ou tard permettre l’élaboration de traitements plus efficaces et/ou d’un vaccin. Les données et analyses issues de ces initiatives sont aussi une source d’information pour les décideurs politiques et leur permettent de comprendre les risques que représente la transmission de la MVE aux humains.

En plus de participer à des formations de terrain organisées par le Centre français de recherche agronomique pour le développement (CIRAD) et d’un mois d’échange technique à l’Institut Robert Koch Germany en République Démocratique du Congo, l’équipe de Ndong Bass Innocent travaille de manière collaborative et est en constante recherche d’opportunités pour accroître ce réseau de collaborateurs.  Dans le contexte de l’approche « Une seule santé », une coopération multisectorielle entre les acteurs majeurs de la santé animale, humaine et des écosystèmes, contribue à la réussite et l’efficacité des missions de terrain, tout comme au projet EBO-SURSY dans son ensemble. Au Cameroun, cela veut dire travailler avec le Secrétariat permanent du Gouvernement et le Programme national de prévention et de lutte contre les zoonoses (Plateforme Une seule santé) ainsi qu’avec un certain nombre de ministères et commissions, tels que le ministère de l’Agriculture, le Ministère des Forêts et de la Faune, ainsi que le Comité d’éthique de la recherche et les Comités de santé, et des ONG telles que le Fond mondial pour la nature (WWF) et la Wildlife Conservation Society (WCS).

1Financé par l’Union européenne sur 5 ans, le projet EBO-SURSY est mis en œuvre par l’Organisation mondiale de la santé animale (OIE) en partenariat avec le Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (CIRAD), l’Institut de recherche pour le développement (IRD) et l’Institut Pasteur. Lancé en 2017, ce projet a pour but l’amélioration des systèmes de détection précoce pour la prévention des maladies chez les animaux sauvages en Afrique occidentale et centrale, notamment celles liées à la Maladie à Virus Ebola (MVE) et à 4 autres fièvres hémorragiques virales :  la Maladie à Virus Marburg, la fièvre de la Vallée de Rift, la fièvre hémorragique de Crimée-Congo, et la fièvre de Lassa. Ces 5 maladies sont des zoonoses, des maladies d’origine animale transmissible à l’humain.


2Pour plus d’informations sur les conséquences d’Ebola pour les humains, consultez le site de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) : https://www.who.int/fr/news-room/fact-sheets/detail/ebola-virus-disease

 

Photos: ©OIE/Sophie Muset